Voilà un sujet qui parait a priori simple à traiter... et qui aboutit si souvent à une "usine à gaz" rigoureusement inutilisable, et de plus fondée sur des principes faux ! Un gâchis fort coûteux, un volumineux dossier abandonné aux spécialistes Ressources Humaines, avant de se couvrir de poussière sur une étagère sans avoir jamais servi à rien.

Pourquoi un tel désastre, alors que les intentions étaient louables ?
Il s'agit tout de même de répertorier l'ensemble des compétences nécessaires pour réaliser les différentes activités demandées à un professionnel !

Le constat :

1 - Un contresens initial :

Ce premier contresens est lié à l'idée que tout type d'activité était réalisée exactement de la même manière par tous les professionnels. On devait donc pouvoir les répertorier, les lister, les transformer en référentiels. Allant plus loin, on pouvait définir et lister les "savoirs", c'est à dire les connaissances, les "savoir-faire" et "-savoir-être", néologisme pour parler des comportements attendus. D'où les interminables listes de chacun de ces chapitres, dont le volume ne peut que décourager n'importe quel manager !
Or quand on analyse plus avant les façons dont plusieurs bons professionnels réalisent une tâche donnée, on se rend compte que chacun procède d'une façon différente. Chacun a des connaissances différentes, des façons d'aborder les problèmes qui dépendent de son expérience, de ses habitudes, de ses goûts, de ses réussites ou échecs passés. Par exemple, face à un cas nouveau, l'un ira chercher dans une bibliothèque, un autre demandera à un collègue qui peut-être se sera confronté à un cas analogue, un troisième ira surfer sur Internet... Et chacun résoudra le cas avec des résultats aussi bons les uns que les autres.
C'est donc par une combinatoire de connaissances, de savoir-faire, de comportements propres à chacun que la compétence se traduit. On ne peut généralement codifier cette compétence de façon uniforme, sauf sans doute lorsque tous ces éléments doivent être figés, comme dans une procédure par exemple.

2 - Un langage inadapté pour les managers et leurs collaborateurs, utilisateurs naturels de ces référentiels :

Le deuxième contresens est lié au fait que ces référentiels utilisent un langage propre aux directions de Ressources Humaines, éloigné du langage des professionnels, et ne décrivent en aucun cas les situations concrètes qui leur parleraient. Aussi, ne sont-ils tout simplement pas utilisés, ou de façon parfaitement formelle sans lien avec le développement des compétences des collaborateurs, qui devrait en résulter.

Evaluation des comptétences

Aussi, même lorsque les managers sont obligés de remplir des feuilles d'évaluation en cochant les cases de ces "référentiels" pour chacun de leurs collaborateurs, ils ne peuvent s'en servir de façon opérationnelle pour définir les objectifs et les moyens de développer les compétences qui devraient être améliorées.

Le développement des compétences, que ce soit par des actions de formation ou toute forme de tutorat interne à l'organisme, met au centre l'activité elle-même : on forme, par exemple, à la conduite de réunion pour les managers, au traitement de telle ou telle transaction ou à l'accueil de la clientèle pour des collaborateurs, pas à l'acquisition de tel ou tel détail de savoir, savoir-faire ou savoir-être !

L'esquisse d'une solution :

Elle passe par un retour à la vie concrète de l'organisme. Bien entendu, un certain nombre de savoir-faire et de comportements sont attendus de leurs collaborateurs mais ils s'inscrivent toujours dans le concret des opérations à traiter.
Il suffit donc de donner la parole à ces professionnels :

  1. ils définiront eux-mêmes, d'abord, les quelques opérations représentatives de leur activité : ils les connaissent bien pour les pratiquer tous les jours,
  2. pour chacune d'elles, ils décriront la façon dont l'organisme souhaite les voir accomplir, en se limitant à l'essentiel, et en incluant les façons de faire que l'organisme, ou la Société dans son ensemble, impose. On y joindra les résultats attendus pour cette activité. Leur description laissera l'indispensable liberté dans la façon de faire, tout en fixant les limites de ce qu'il est possible pour "agir en professionnel",
  3. une fois ces "situations de travail types"1 décrites et validées, au moment de l'évaluation, chaque collaborateur décrira une situation concrète qu'il a eu à gérer, et pratiquera une auto-évaluation. La confrontation avec son manager, qui quant à lui aura apprécié les résultats, permettra de définir sur quels points faire porter l'effort de développement des compétences... Mais ce sera l'objet d'un prochain article !

Pour vous accompagner dans la mise en place d'un référentiel de compétences, vous pourrez utilement vous référer à notre prestation "Elaboration de référentiels de compétences "opérationnels"".

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1 L'expérience montre que le nombre de ces situations de travail types va d'une quinzaine pour les fonctions les plus techniques à une petite trentaine pour les fonctions les plus diversifiées.